Enfants de déportés juifs, ils se souviennent de la rafle de juillet 1942
L'Union, Soissons, jeudi 13 juin 2019
Je me souviens très bien de la soirée où mes parents ont été emmenés, raconte Nathan Lewkowicz. J'avais 11ans. C'était la rafle de juillet 1942.» Avec sa soeur, Clairette Lhuet, ils assistaient ce dimanche à une réunion organisée à l'église Saint-Pierre avec plusieurs descendants de juifs soissonnais déportés. «Mes parents ont été autorisés par les gendarmes français (NDLR: qui agissaient sous les ordres de Vichy et de la Gestapo) à nous faire adopter par notre soeur aînée, Germaine, qui vivait avec son mari, Jacques Bouldoire, en face de Magany (futur Monoprix)», ajoute Clairette, qui avait tout juste 5 ans à l'époque. Le but était de transférer les deux enfants et leur autre soeur, Micheline (décédée depuis), «en zone libre», comme le rappelle Nathan Lewkowicz. C'est ainsi que les enfants Lewkowicz ont échappé à une mort certaine. Robert Lewkowicz, leur père, qui était tailleur autour de la place Centrale (future place Fernand-Marquigny), et leur mère n'ont pas eu cette chance. «Ils ont été amenés à Drancy, puis à Auschwitz. On a reçu une lettre de leur part, puis, plus aucune nouvelle», détaille Nathan Lewkowicz. Cette histoire ils ont pu en parler avec les descendants de la famille Liwer, réunis grâce à Stéphane Amélineau, qui a écrit le livre La Shoah en Soissonnais: Journal de bord d'un itinéraire de mémoire: «Quand mon livre est sorti les gens de la famille Liwer ont voulu rencontrer d'autres survivants du Soissonnais. Ils voulaient aussi revenir à Soissons.» Dans les années 1940, il existait quatre branches de la famille Liwer dans le Soissonnais, trois à Soissons et une à Crouy. Stéphane Amélineau a permis aux Lewkowicz de rencontrer Lisette Ehrenkranz-Liwer, qui vit en Israël et qui avait été sauvée par la famille Laplace qui l'a hébergé quand elle avait 6 ans, ou encore Alain Barthel, fils de la survivante Madeleine Liwer, et petit-fils d'Avram Adolphe Liwer, mort en déportation. Avram Adolphe Liwer et Robert Lewkowicz se connaissaient et leurs enfants jouaient ensemble. Les deux hommes se seraient croisés une dernière fois à Drancy. Nathan Lewkowicz et Clairette Lhuet étaient ravis de parler avec Alain Barthel. Ce dernier, qui vit actuellement en Allemagne, était content de rencontrer les copains d'enfance de sa mère: «C'est la première fois que je viens à Soissons, mais je trouve dommage que ma mère, qui est décédée en 2008 ne soit pas avec nous.» Les échanges se sont malgré tout avérés très émouvants.
Hervé Marti
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