AVEC LES HÉROS DE 40... pages 19, 20 et 21
56e RÉGIMENT D'INFANTERIE ENCERCLÉS. (5 juin 1940.) LE 5 juin, les 9e et 10e compagnies du 56e régiment d'infanterie, respectivement commandées par le sous-lieutenant Courcenet et le capitaine Canet, soutiennent héroïquement, à Dury sur la route Amiens-Paris, le choc des divisions ennemies. A la tombée de la nuit, les deux officiers décident de regrouper les restes de leurs unités dans le parc du château et de transformer celui-ci en forteresse. Ils n'ont pas de vivres, pas d'eau, mais disposent de deux jours de munitions. Ils vont rester seuls, encerclés, très en avant de notre seconde ligne et, lorsque le repli des unités qui la défendent s'effectuera, le 6 juin, on les entendra encore se battre. Ce même jour, à midi, l'artillerie française prend violemment à partie Hébécourt, où, depuis l'avant-veille, la 5e compagnie du 56e résiste aux coups répétés des chars, de l'aviation, de l'artillerie et de l'infanterie. Impossible de lui signaler que le village, auquel les obus incendiaires allemands ont mis le feu, est encore entre nos mains. Pour maintenir la liaison entre les points d'appui, il faut traverser les maisons en flammes et enfoncer à coups d'épaule les portes des granges, sous une nappe de projectiles amis et ennemis. A 15 heures, le capitaine décide de rassembler les survivants et de tenter un repli sur la seconde ligne, à Nampty. Et il se met en chemisette bleu noir pour que ses hommes puissent plus facilement le reconnaître et obéir à ses gestes. Il va falloir parcourir 4 kilomètres sous un soleil de feu, à travers des champs nus que le tir des blindés aux aguets va certainement balayer. On attache les mitrailleuses sur le cadre des vélos encore intacts ; on emporte les blessés, et, par échelons dispersés, les survivants de la 5e compagnie se mettent en marche. Le lieutenant Pommier, commandant la 4e section, engagé, au corps à corps, dans une ferme, assure la protection du repli, puis décroche à son tour. Mais l'avion de reconnaissance ennemi, le « mouchard », qui ne cesse de surveiller le combat, a vu le mouvement. Il lâche de petits parachutes qui jalonnent l'itinéraire de repli. Aussitôt les barrages d'artillerie se déclenchent avec précision. Puis les Messerschmitt viennent mitrailler au sol nos unités et, enfin, les bombardiers en piqué les arrosent de bombes. A tout prix, l'ennemi veut couper la retraite aux héroïques défenseurs d'Hébécourt, qui l'ont tenu en échec pendant deux jours et lui ont infligé des pertes sévères. Mais l'infanterie allemande est harassée par la chaleur et les assauts successifs, et les chars, déjà très éprouvés, craignent de tomber dans un piège. La compagnie atteindra Nampty sans trop de mal.
Cordialement Eric ABADIE
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